Disney achète Lucasfilm pour 4,05 milliards $
3D
Plus tôt aujourd’hui, on apprenait que le géant Disney faisait l’acquisition de Lucasfilm et de la marque Star Wars pour un montant de 4,05 milliards $.
À une époque où les studios d’Hollywood privilégient les séries et les valeurs sûres, force est de constater que l’on retrouve dans la marque Star Wars une recette éprouvée, donc rassurante pour un géant comme Disney — une structure mythique reposant sur des éléments inspirés de westerns, du cinéma japonais, des documentaires de Claude Jutras, du cameraman Jean-Claude Labrecque et des ouvrages de Joseph Campbell, lequel agira éventuellement en tant que conseiller de Lucas dans la saga Star Wars.
Depuis le lancement du premier Star Wars le 25 mai 1977 dans 45 salles (contre 2655 salles de nos jours), George Lucas a plus d’une fois fait preuve d’un sens aigu de la mise en marché, d’abord en révolutionnant l’univers des effets spéciaux (il fonde Industrial Light and Magic ou ILM), ensuite en réinventant le monde du son grâce à THX Ltd, du jeux vidéo avec LucasArts, de la post-production et mixage son avec Skywalker Sound et de l’animation avec le célèbre studio Pixar.
Personnellement, jamais je n’oublierai le « lightsaber » (« sabre de lumière », ou « sabre lumineux »), les pistolets lasers, le double coucher de soleil sur la planète Tatooine ou les chasseurs X-wing.
Pour la petite histoire, le premier projet intitulé The Star Wars contient 14 pages écrites à la main.
Monsieur Lucas comprend dès le départ l’importance de créer un monde féérique. Pour ce faire, il n’hésite pas à choquer l’industrie. Ainsi, il fait débuter chacun de ses films non pas par un générique, mais par un texte déroulant à l’horizontal et présentant l’intrigue, fortement inspiré des débuts de Flash Gordon, faut-il le préciser. Lucas sera d’ailleurs poursuivi par la Directors Guild of America et de la Writers Guild of America à cause de son refus de débuter ses films par un générique.
Par ailleurs, les 6 films Star Wars de George Lucas utilisent une formule éprouvée, inspirée des écrits de Joseph Campbell.
Star Wars, c’est le voyage initiatique d’un héros. La série cristallise l’éternel combat entre le bien et le mal avec ses héros et méchants, princes, magiciens et ogres.
Le premier film sort en 1977, en pleine crise politique et économique. La galaxie de Star Wars est cosmopolite. L’histoire est simple :
- Un chevalier noir : Darth Vader.
- Une demoiselle en détresse : la princesse Leia.
- Un appel à l’aide : R2D2.
- Un prince charmant qui passe à l’âge adulte : Luke Skywalker.
- Une mission : délivrer la princesse du méchant.
- Une aide surnaturelle : un guide, un maître.
- Un talisman magique : le sabre-laser de son père.
- Un pouvoir spirituel : la force et Yoda.
- Des partenaires : Chewbacca et Han.
- Un labyrinthe : l’Étoile Noire.
- Un dragon et/ou des monstres : ils abondent.
- La chasse : les batailles en chasseurs X.
- La trahison : Lando livre Han à Vader.
- Les tentations : « sois mon allié ».
- Le mariage mystique
- La résurgence du mal : les nombreuses vies du mal.
- La descente aux enfers : les difficultés s’accumulent.
- La réconciliation avec le père
À l’évidence, George Lucas est un conteur de grand talent. Il entre à l’University of Southern California pour y étudier le cinéma et tourne son premier film: THX 1138. C’est là qu’il devient un passionné de contes et de légendes. En cours de réflexion, il découvre un livre clé qui va changer sa vie : Les héros sont éternels de Joseph Campbell.
Quand on lui demande d’expliquer le processus créatif relatif à la création de Star Wars, Lucas déclare : « J’ai d’abord essayé d’adapter certains grands principes de la mythologie à mon histoire. Comme cela ne fonctionnait pas, j’ai finalement décidé de laisser tomber et de me concentrer à la rédaction de l’histoire à part entière. J’ai découvert, en me relisant, que tous les principes mythiques étaient présents. »
En entrevue, il affiche une fascination pour le mythe. « Toutes les histoires mythiques possèdent une réserve commune d’images et de symboles », aime à répéter Lucas.
Pour respecter la structure mythique, le héros doit se couper du monde ordinaire, puis subir une série d’épreuves : l’initiation. Luke, l’adolescent rebel, avide d’aventures, se métamorphose ensuite en héros. Au cours de son itinéraire, il croise ogres et magiciens, labyrinthes et pièges.
Cette recette a permis à George Lucas de générer des ventes remarquables. Jusqu’à maintenant, les six films de la série ont généré 4,49 milliards $ de vente de billets et 10 milliards de vente de jouets. On annonce d’ailleurs un 7e film qui sera lancé en 2015.
(En passant, suite aux ventes décevantes des produits associés au film Godzilla en 1998, c’est Lucas qui va racheter la production invendue pour ensuite la faire fondre et la transformer en poupée Star Wars ! Brillant le monsieur !)
En cours de route, Lucas devient un control freak. Il sélectionne les cinémas qui présenteront son film ; il exige de se faire payer à chaque semaine plutôt qu’aux deux semaines ; il exige qu’on lui donne la salle la plus grande du cinéma ; il interdit les publicités avant ses films ; et le film doit rester à l’affiche au moins douze semaines dans chaque salle.
Lucas développe aussi le concept de teasing afin d’annoncer le lancement prochain d’un autre film de la saga. Mais comme il génère jusqu’à 10 % des profits de la Fox certaines années, on laisse libre cours à ses demandes.
Au total, les ventes de la marque incluant celles des produits dérivés et des films s’élèveraient à près de 30 milliards $. Il est vrai que les différents films de la série ont donné naissance à des jeux vidéo, des romans, des bandes dessinées, et bien sûr, des poupées pour hommes ou figurines, si vous aimez mieux.
Pas mal pour un gars qui accepta de réduire son cachet de moitié pour financer la fin du tournage de son premier film au milieu des années 70 en échange des droits sur les produits dérivés. Une autre approche qui a d’ailleurs changé de fond en comble l’industrie du cinéma et permis à Lucas d’être l’un des actionnaires les plus importants de Kenner qui deviendra par la suite Hasbro, l’un des deux géants du jouet avec Mattel…