Achat local: mode passagère ou habitude durable?
MarketingAu Québec et au Canada, l’achat local est devenu un mot d’ordre pour plusieurs consommateurs. Visiblement, les perturbations récentes liées à la guerre des tarifs ont amplifié cet intérêt pour les produits d’ici.
«Le Groupe MAG, qui produit la mayonnaise du même nom à Lévis, a vu ses ventes quintupler au cours des dernières semaines, écrit la journaliste Diane Tremblay. Cela s’est traduit par l’embauche d’une dizaine d’employés pour l’entreprise qui évolue dans le secteur de la transformation alimentaire dans la région de Québec.»
Firebarns, connue pour ses sauces piquantes et ses condiments qui ne sont pas épicés, dont un ketchup, confirme cet engouement:
«Déjà on l’a vu sur le trafic sur notre site web! Il y a plusieurs personnes qui sont très intéressées et qui veulent en apprendre plus sur nos produits», souligne Pierre-Olivier Drouin, qui est propriétaire avec Frank Ménard des sauces Firebarns, dans un article de Marianne Langlois.
Si l’achat local est célébré pour son rôle dans la revitalisation des économies régionales (pain tranché, barres tendres, déodorant, crèmes hydratantes, etc.), il doit aussi composer avec les réalités de l’univers marketing.
Pour que ce nouveau réflexe de l’achat local chez les consommateurs québécois devienne une habitude, le marketing des firmes québécoises et canadiennes devra jouer sur plusieurs fronts:
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Tirer profit du sentiment d’appartenance des consommateurs. Les campagnes doivent raconter des histoires humaines et locales (storytelling). Pour communiquer ces histoires, pensez site internet, publicité, emballage et relations publiques.
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Faciliter l’identification aux produits locaux via des labels clairs (ex. «Fait au Québec», «Fait au Canada») ou des certifications (Aliments du Québec). Depuis quelques semaines, plusieurs bannières ont d’ailleurs mis en place un meilleur affichage en magasin pour guider le consommateur sur les produits québécois ou canadiens.
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Faciliter l’accès aux produits locaux via présence accrue dans les canaux de distribution les plus populaires, comme les supermarchés (Metro, IGA, Maxi, Provigo, Super C), les épiceries indépendantes (ex.: Marché Richelieu), Walmart et Costco. L’objectif clé est de rendre l’achat local plus accessible.
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Mettre en avant les avantages des produits d’ici (qualité, fraîcheur, durabilité) pour que le surcoût de nos produits (oui, oui, c’est souvent le cas) devienne un investissement plutôt qu’une dépense. C’est le rôle de la publicité, des relations publiques et de la commandite.
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Sensibiliser les consommateurs aux bénéfices à long terme de l’achat local (économie locale, emplois stables, environnement) pour dépasser la barrière du prix. Par ailleurs, je précise que l’argument “Québec” ou “Canada” ne peut pas être votre seule promesse/positionnement pour convaincre le consommateur.
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Créer des programmes de fidélité ou des rabais ciblés. Les habitudes naissent de la répétition.
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Communiquer sur les médias traditionnels et les nouvelles plateformes. Accorder des entrevues dans les médias et partager vos histoires à succès sur les médias sociaux: Facebook, X (Twitter), TikTok, Instagram, YouTube, LinkedIn, Threads, Bluesky, etc.
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Simplifier l’acte d’achat local, notamment via des plateformes numériques. Une enquête NETendances 2023, publiée en 2024 par l’Académie de la transformation numérique, révèle que seulement 15% des achats en ligne des Québécois vont à des marchands locaux, malgré une hausse globale des cyberachats à 17,8 milliards $. Cela souligne l’urgence de stratégies marketing pour capter ce marché numérique.
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Identifier les groupes les plus enclins à acheter local: prospects et publics cibles.
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Répondre à la demande. Évidemment, s’assurer que votre produit se retrouve sur l’étagère est une condition sine qua non à la réussite à plus long terme.
Sur le plan marketing, transformer une mode passagère en un comportement à long terme nécessite une combinaison de stratégies pragmatiques, émotionnelles et structurelles. Ce n’est pas une chose facile.
Les consommateurs peuvent être attirés à court terme par le sentiment d’appartenance et l’idée de soutenir des entreprises d’ici. Mais le véritable défi, c’est de s’assurer qu’un comportement à court terme devienne une habitude à long terme.
(Note : Ce texte est extrait de l’Infolettre marketing de Luc Dupont, diffusée par courriel chaque semaine. Dans cette newsletter, Luc Dupont propose une revue complète des actualités en marketing, médias, communication et publicité. Le cas échéant, certains articles sont repris ici ultérieurement. Pour vous abonner)
