Claude Cossette parle de publicité (2 de 2)
Claude CossetteDans cette deuxième portion d’entrevue, Claude Cossette parle de publicité, de créativité et de marketing.
Q : Décrivez-nous votre philosophie de la publicité ?
Pour moi, la publicité ne consiste pas à faire de beaux dessins, mais plutôt à établir une stratégie de persuasion: c’est cela qui est important. Comment changer la perception que les gens ont de mon produit ou de mon service (ou de mon candidat, en politique) ? C’est ça qui est la tâche propre de la publicité.
En 1970, vous demandiez à une agence de publicité de vous faire une campagne et elle vous arrivait trois jours après avec une campagne toute faite: messages radios, affiches, etc. Chez Cossette, nous arrivions avec… un document écrit: objectifs, cible, stratégie, média, budget. Et c’est seulement à partir de cela que nous mettions au point les pièces d’une campagne.
Q : Pour Claude Cossette, qu’est ce que de la bonne publicité ?
De la publicité, c’est de la communication. A tout moment, communiquer c’est persuader, vouloir changer la façon de voir les choses, de percevoir les personnes, les marques. C’est cela de la publicité.
La publicité peut paraître plate à certains, belle à d’autres; on peut la créer magnifique, grandiose, humoristique, sérieuse, cynique, dramatique. Là n’est pas l’important. L’important, c’est de savoir si je me suis pris de la bonne façon pour arriver à ce que les clientèles-cibles que je vise, à qui je parle, pensent un peu plus de la façon dont moi je veux qu’ils pensent. C’est cela de la bonne publicité.
Q : Donc la pub n’a pas besoin d’être belle à tout coup ?
Dans les produits de beauté, cela est important. Mais dans la lessive, cela n’est sans doute pas nécessaire.
Q : Et l’originalité, la créativité ?
La créativité est surtout importante sur le plan de la stratégie: nouvelle stratégie média, nouveau positionnement, nouvelle stratégie persuasive. Encore une fois, l’important dans une campagne de publicité, c’est d’atteindre les buts persuasifs fixés au départ.
Q : Au fond, qu’est-ce qui vous fascine dans la publicité? Pourquoi aimez-vous autant la publicité ?
Je pense que la publicité est devenue dans la société contemporaine une force marquante; une force nécessaire dans les sociétés complexes dans lesquelles on vit. Je sens que c’est une force entre mes mains, un outil de «manipulation» sociale diraient les mauvaises langues.
C’est évident qu’aujourd’hui la publicité joue un rôle économique et culturel de premier plan. A mon avis, elle a même une influence culturelle plus importante que la peinture, le théâtre, ou même le cinéma; seule peut-être la musique peut lui être comparée.
Q : Qu’est-ce que vous n’aimez pas dans la publicité ?
D’abord, la publicité est envahissante. Elle me pue au nez (grand éclat de rire). Ses interventions à répétition m’énervent. Je ne suis plus capable de regarder mes films tranquillement sans les voir interrompus par des messages publicitaires à toutes les dix minutes. C’est épouvantable.
Par ailleurs, le plus grand vice de la publicité, c’est la duplicité; c’est de tromper les gens en leur faisant prendre des vessies pour des lanternes en leur disant: « Vous serez plus heureux si vous achetez mon automobile, mon parfum, ou mon voyage dans le Sud. » C’est là qu’elle est vicieuse. Le bonheur, c’est d’être, pas d’avoir, mais la publicité laisse croire le contraire.
Q : Y a-t-il un publicitaire qui vous a marqué ?
Je peux dire que le seul publicitaire qui m’a fortement influencé, c’est Robert Delpire, président de l’agence Delpire dans les années 60-70.
Q : Alors, présentement, quel est le meilleur publicitaire au Québec ?
Il n’y en a pas de « meilleur » publicitaire au Québec. Aujourd’hui, la publicité se fait en équipe. Tu peux essayer de monter en épingle une vedette, mais cela se fait surtout pour des raisons de marketing, d’auto-publicité et non pas parce qu’une personne est plus géniale qu’une autre.
Une campagne, aujourd’hui, c’est trop complexe pour qu’une seule personne la tienne à bout de bras. On ne peut en accorder le mérite d’une campagne à succès à un seul ou une seule publicitaire.
Voir aussi :
La première partie de cette entrevue avec Claude Cossette
L’intégrale de cette entrevue avec Claude Cossette
Que sont devenues les 36 cordes sensibles ?
Les 10 meilleures pubs de l’histoire du Québec
Les livres de Claude Cossette