Sur les origines de la téléréalité
Culture populaireD’un point de vue scientifique, lorsqu’autant de gens sont rivés à leur téléviseur comme ce fut le cas hier soir lors de la présentation d’Occupation Double 7 à TVA, c’est qu’il se passe quelque chose qui mérite que l’on y prête attention.
Lors de la première de l’émission An American Family, présentée sur le réseau PBS en 1973 et mettant en vedette une vraie famille vivant dans une vraie maison, on est loin de se douter qu’on vient de donner naissance à un genre qui révolutionnera éventuellement la télévision.
Lors de la présentation de l’épisode final, plus de 10 millions de téléspectateurs regarderont l’émission que l’on présente alors comme une expérience de nature sociologique.
Après avoir visionné la première saison, l’anthropologue Margaret Mead affirmera que le genre ne doit pas être confondu avec un documentaire et qu’à ce titre, il est nécessaire créer un nouveau terme pour décrire ce nouveau format de TV.
Malgré ce succès immédiat de cote d’écoute, le documentaire intimiste ne gagne que lentement en popularité. En 1974, la BBC propose The Family, un concept semblable à celui de PBS. Huit ans plus tard, la chaîne australienne ABC lance à son tour une émission qui s’inspire de la série An American Family.
Avec l’émergence de nouvelles émissions au milieu des années 1990, la téléréalité s’internationalise. En Suède, la série Expedition Robinson est vendue dans une vingtaine de pays.
En 1991, la téléréalité Nummer 28 produite aux Pays-Bas initie une nouvelle mode : celle des émissions qui demandent à des étrangers de vivre ensemble pour une certaine période de temps.
Officiellement, le concept de la téléréalité émerge en 1994 dans la tête de Joop Van Ende et John De Mol, fondateurs de la société de production néerlandaise Endemol. John De Mol est un producteur d’émissions de télévision et il travaille brièvement à la radio. De son côté, Joop Van Ende possède une entreprise spécialisée dans le multimédia, le divertissement et le théâtre commercial.
Ensemble, ils créent un nouveau type d’émission reposant sur quatre éléments centraux :
1. Un environnement dénudé : le décor ne doit pas offrir aux participants un échappatoire à la confrontation entre les candidats.
2. Un système d’élimination : la menace de l’élimination renforce les tensions entre les participants.
3. Des tâches édictées par les organisateurs du jeu : elles permettent de maintenir une activité et de forcer les candidats à interagir.
4. Un confessionnal : il permet d’avoir accès aux pensées et aux sentiments des participants et révèle aux téléspectateurs les alliances et les rivalités.
Selon le cas, ces éléments peuvent être combinés avec d’autres aspects, tels que la séduction, mais ils restent les marques de fabrique de la téléréalité.
En 1997, lorsque le chanteur Bob Geldof propose Exposition Robinson à la télévision suédoise, la téléréalité connaît un nouvel élan. Désormais, le divertissement devient un jeu. Les candidats s’éliminent et le gain en argent est significatif.
En 1999, l’émission Big Brother, présentée initialement aux Pays-Bas et aujourd’hui vendue dans plus de 70 pays, introduit le temps réel par la diffusion en direct. Les émissions renouent avec la vie réelle, même si dans les faits, elles sont toujours coupées et montées.
En 2000, CBS présente la première de Survivor, une adaptation de Expedition Robinson. Mark Burnett, un ancien parachutiste et créateur de Survivor, reconnaît d’ailleurs avoir fondé son concept sur des modèles suédois et néerlandais.
Le premier épisode de la série attire 15,5 millions de téléspectateurs. Grâce à Survivor, l’auditoire de CBS double, passant de 10 à 20,5 millions de téléspectateurs, en moyenne.
Lors de la finale présentée le 16 août 2000, 51 millions de personnes sont rivées à leur écran. Cette année-là, le Super Bowl est la seule émission qui attirera davantage de téléspectateurs aux États-Unis, soit 88 millions. Sans surprise, les concepts de téléréalité se multiplient dans les années subséquentes.
Plus récemment, nous entrons dans une nouvelle ère de la téléréalité où l’Internet, le placement de produits, la promotion par l’objet et les contenus multimédias domineront. Il suffit de jeter un coup d’œil sur le site d’Occupation Double et le Facebook d’Occupation Double (un message pro-JoÈve ou pro-Magalie ? a généré plus de 2 000 réponses) pour s’en convaincre.
Voir aussi :
10 facteurs qui expliquent le succès de la téléréalité